L’interview de l’auteure Christelle Dabos
- Steven le Tonqueze
- 1 sept. 2015
- 15 min de lecture
Bonjour à toutes et à tous !
Aujourd'hui nous nous retrouvons pour un chouette moment en compagnie d'une auteure que j'affectionne tout particulièrement. Vous l'aurez compris, nous voici réunis pour une toute nouvelle interview d'auteur aux côtés de Christelle Dabos, l’auteure du roman « La Passe-Miroir - Tome 1 : Les fiancés de l'hiver » qui comme vous le savez déjà, a été un véritable coup de coeur pour moi. Christelle a très gentiment acceptée de répondre à mes quelques questions et je l’en remercie infiniment.
Voici donc l’interview de Christelle, mais avant de lui laisser la parole je vais vous présenter rapidement son parcours et ce qui m’a plu chez elle !
Christelle Dabos est MON coup de cœur du moment, originale, créative, sympathique et talentueuse, elle manie sa plume divinement bien dans son premier roman "La Passe-Miroir", pour notre plus grand plaisir. Une auteure qui restera dans ma mémoire !

INTERVIEW
Bonjour Christelle,
Merci d'avoir accepté cette interview, pourriez-vous vous présenter aux lecteurs de Steven's Books et présenter votre parcours d’écrivain pour ceux qui ne vous connaissent pas encore ?
Ah, je n’en voudrais à personne de ne pas me connaître encore, d’autant que mon « parcours d’écrivain » est assez bref. Je m’appelle Christelle Dabos, j’habite dans un village belge et je n’ai publié à ce stade qu’un seul titre : les Fiancés de l’hiver, premier tome de la série la Passe-miroir. Mon roman a eu la chance d’être le lauréat du concours organisé en été 2012 par Gallimard Jeunesse, en partenariat avec Télérama et RTL (d’ailleurs, s’il y a des graines d’auteur parmi vous, il y a actuellement une nouvelle édition du concours qui se clôturera fin septembre). Avant cela, j’étais une auteure du net tout ce qu’il y a de plus anonyme et je postais mes histoires en ligne sur le site de Plume d’Argent. Si mon entourage ne m’avait pas poussée à participer au concours, je le serais probablement toujours aujourd’hui. Je suis une grande timide.
Comment en êtes-vous venu à l’écriture ? Où en êtes-vous aujourd’hui ?
Quand je discute avec d’autres auteurs professionnels, je m’aperçois qu’ils se voyaient déjà écrivains depuis l’enfance. Tel n’a pas été mon cas. Je me suis mise à écrire mes premières histoires pendant mes années fac et c’étaient des mini-nouvelles humoristiques uniquement destinées à faire sourire ma meilleure amie.
Ensuite, il y a eu l’avènement Harry Potter. Ou plus exactement, l’avènement Rogue, le très ambivalent professeur de potions. C’était l’époque où le cinquième tome tardait à paraître et je m’étais entichée du personnage. J’ai décidé d’inventer moi-même la suite des aventures et j’y ai pris un tel plaisir que ça a été un véritable déclic. Je ne me suis plus jamais arrêtée d’écrire depuis ! Sous l’influence du Seigneur des Anneaux, j’ai ensuite écrit un roman medieval fantasy qui n’a pas quitté mes tiroirs (et qui ne les quittera jamais) et, après quelques errances, j’ai commencé les premiers chapitres de ce qui allait être la Passe-miroir. Ça a été la toute première histoire où, ça y est, je créais un monde qui me reflétait véritablement.
Deux choses me sont alors arrivées presque simultanément : on m’a diagnostiqué un cancer à 28 ans et j’ai découvert la communauté d’auteurs de Plume d’Argent. Ces deux événements ont eu un impact décisif sur mon approche de l’écriture. J’ai cessé d’écrire du bout des doigts et j’ai commencé à y mettre vraiment mes tripes. Moi qui ne voulais avant jamais changer une virgule de ce que j’écrivais au premier jet, je me suis mise à travailler et retravailler mon texte, à aller au fond des choses.
Aujourd’hui, je suis en bonne santé et l’écriture est devenue une partie de moi.
Pourriez-vous parler de l’écriture de "La Passe-Miroir" ? De son écriture à sa parution, le chemin a-t-il été difficile ?
Difficile et exaltant à la fois. J’ai commencé la Passe-miroir en 2007 et l’histoire a subi beaucoup, beaucoup de métamorphoses depuis sa toute première version. J’ai connu des périodes où la rédaction coulait de source, où j’étais en phase absolue avec mes personnages et l’histoire que je voulais raconter. Et j’ai traversé d’interminables déserts où j’ai dû m’arracher chaque mot du corps avec l’impression de ne plus avancer, freinée par les doutes et par la peur.
La Passe-miroir a d’abord été une totale improvisation. Les mille premières pages ont été écrites comme ça me venait, inventant pour mon héroïne des obstacles, des mystères et des défis sans jamais me poser la question de leur résolution. Je n’avais pas la plus petite idée de la façon dont tout ceci allait évoluer, sans même parler de se conclure. J’ai ensuite traversé une période où je me suis cherchée (où je me suis un peu perdue aussi) à travers le roman : je l’ai soudain assombri, rendu beaucoup plus adulte et moins fantaisiste, toujours sans avoir d’idée précise de la direction que je prenais.
Être éditée ? Je n’y songeais même pas à ce moment-là !
J’ai alors décidé de toute reprendre depuis le début en cherchant à obtenir, cette fois, une vision claire de ce que je voulais. J’ai enfin commencé à me poser des questions : pourquoi est-ce que j’écris cette histoire ? qu’est-ce qui motive mes personnages ? quels sont les thèmes que je veux traiter à travers eux ? quelles sont les forces et les enjeux qui sous-tendent cet univers ? quelles sont les grandes étapes initiatiques du récit ? quelle est la meilleure façon de les raconter ?
À partir de là, j’ai tout réécrit ! J’ai eu l’impression, en mettant le point final au nouveau premier tome de la Passe-miroir, que j’avais enfin réalisé quelque chose non pas de parfait, mais d’abouti. C’est forte de cette conviction, et soutenue par mon entourage, que je l’ai envoyé à Gallimard Jeunesse dans le cadre du concours.
Je me sens aujourd’hui comme le marin qui tient le gouvernail de son navire en gardant le cap, et ce quels que soient les états d’âme de ma mer intérieure.
Quelle organisation adoptez-vous quand vous écrivez un roman ? Pouvez-vous nous expliquer un peu votre technique ?
Je me suis longtemps cherchée, longtemps dispersée avant de trouver le mode opératoire qui me convenait le mieux. Je l’ai baptisé « le plan fluctuant ». J’ai fini par comprendre que j’ai, dans le cadre de la Passe-miroir en tout cas, vraiment besoin de savoir où je vais, de connaître le dénouement de l’histoire et les grandes étapes intermédiaires qui vont y mener. Il m’est aussi nécessaire de bien cerner les motivations de chaque personnage, afin que sa façon d’impacter l’intrigue soit crédible. Enfin, comme le monde de la Passe-miroir est une réalité différente de la nôtre, je prends désormais le temps de bien maîtriser sa cohérence interne : quelles sont les règles et les limites inhérentes à chaque pouvoir familial, notamment. Bref, je fais un plan. Et je le combine avec des fiches-personnages, des schémas, des croquis et tout le tralala. Là où ça devient intéressant, c’est que je me lance dans l’écriture en acceptant d’office l’idée que ce plan sera amené à fluctuer. Je ne me cramponne pas coûte que coûte à ce qui était prévu sur le papier. La créativité fait que l’histoire prend souvent son autonomie (et c’est précisément pour ces instants de grâce que j’aime tellement écrire). Si un personnage agit soudain d’une façon que je n’avais pas du tout venir, mais que je trouve infiniment plus passionnante à exploiter que mon idée de départ, je change tout mon plan en conséquence si nécessaire.
En dehors de cela, je n’ai aucune organisation particulière. Je ne mets pas mon réveil pour écrire de bon matin. Je ne me force pas à écrire tous les jours. J’écris comme ça vient quand ça vient, lentement mais sûrement !
Pouvez-vous nous présenter votre roman "La Passe-Miroir et nous parler un peu plus de ses personnages ?
Urg. Ça, c’est « la » question sur laquelle je coince toujours. C’est dingue, parce que je peux écrire plusieurs centaines de pages sur la Passe-miroir, mais dès qu’il s’agit d’en parler de façon synthétique, je bloque.
Pour l’histoire proprement dite, je vais très lâchement copier-coller la quatrième de couverture : « Sous son écharpe élimée et ses lunettes de myope, Ophélie cache des dons singuliers : elle peut lire le passé des objets et traverser les miroirs. Elle vit paisiblement sur l’arche d’Anima quand on la fiance à Thorn, du puissant clan des Dragons. La jeune fille doit quitter sa famille et le suivre à la Citacielle, capitale flottante du Pôle. À quelle fin a-t-elle été choisie ? Pourquoi doit-elle dissimuler sa véritable identité ? Sans le savoir, Ophélie devient le jouet d’un complot mortel. »
Le livre s’articule donc autour de la relation entre la petite et maladroite Ophélie et le grand et frigorifique Thorn. J’ai toutefois fait le choix de ne pas mettre leur relation au tout premier plan : l’histoire ne se résume pas à eux seuls et il y a d’autres personnages, d’autres mystères, d’autres enjeux à découvrir à travers les mésaventures d’Ophélie au Pôle.
Ophélie est un personnage profond et parfaitement imparfaite, la création des personnages est toujours un passage délicat dans l'écriture d'un roman, comment avez-vous créé tous ces petits personnages que l'on prend gout à détester et adorer ?
Ah, ah, « parfaitement imparfaite », c’est bien trouvé ! Créer les personnages est ce qui me demande le moins d’effort. Les miens flirtent un peu avec la caricature, ils ont chacun à leur façon un petit côté excessif, mais je suis née dans le sud de la France et c’est peut-être mon côté méridional qui prend le dessus. Ophélie s’est imposée d’elle-même : tout l’univers, toute l’histoire de la Passe-miroir a découlé de ce personnage-là. J’ai mis du temps à bien dessiner les nuances et les contours de son caractère, mais son essence a préexisté à tout le reste. Thorn a jailli presque aussi vite, en ce sens qu’il était le contrepoint d’Ophélie : je voulais qu’elle se retrouve liée à un personnage qui soit son reflet inversé. Le personnage de Berenilde devait être l’image de la parfaite dame du monde qu’Ophélie ne sera jamais. Archibald, par contre, il est sorti de je-ne-sais-où : c’est un personnage qui existe totalement par lui-même et que j’ai découvert au fur et à mesure que j’écrivais sur lui. Et il y a aussi Renard, Gaëlle, la tante Roseline et le grand-oncle qui apportent chacun une petite touche positive au monde pas toujours très rose d’Ophélie.
Le Monde que vous avez créé dans votre roman doit demander un travail considérable, faites-vous des recherches avant de vous lancer dans l'écriture ?
Au tout début, quand j’ai créé le monde de la Passe-miroir, ses arches et ses familles, je n’ai fait aucune recherche. Ça a donné un décor en carton-pâte qui tenait vaguement debout pour peu qu’on n’y regarde pas de trop près. C’est plus tard que j’ai commencé à me poser la question de la crédibilité et de la cohérence interne du monde, et donc que j’ai commencé à me documenter. J’y ai pris un tel plaisir que je ne me suis jamais arrêtée. Mon univers est totalement fictif, mais je m’inspire beaucoup de notre Histoire à nous pour lui donner sa substance. Par exemple, la cour du Pôle m’a été inspirée par la cour versaillaise de Louis XIV. Pour le niveau de technologie (les téléphones, les ascenseurs, les dirigeables, les appareils photographiques, le gaz, l’électricité, etc.), je me suis documentée dans les catalogues des expositions universelles de la fin du XIXe siècle. Le plus drôle, c’est que je vais parfois faire des recherches documentaires pendant des heures pour un point de détail qui passera totalement inaperçu à la lecture !
Passe-miroir, liseuse, écharpe animée, lunettes magiques... D'où vous viennent toutes ces idées ? Quelle est la genèse de "La Passe-Miroir" ?
Je me représente mon imagination comme un énorme système digestif. Depuis toute petite je regarde des dessins-animés, je lis des bandes-dessinées, je dévore des livres, je visionne des films et des séries, et ils ont tous, absolument tous laissé une empreinte en moi. Mon petit théâtre intérieur s’est nourri de tout ça, combinant tel ingrédient avec tel autre et, mélangé à mon vécu personnel, ça fait « pop ! » Par exemple, la dimension passe-miroir de mon roman est un mélange de l’univers de Lewis Carroll et du Passe-muraille de Marcel Aymé. Les lunettes d’Ophélie viennent de ma propre myopie et du complexe idiot que je faisais à l’idée de devoir porter des lunettes : d’imaginer des lunettes sensibles aux émotions de son porteur, ça m’a aidée franchir le pas. L’animisme en général vient du fait que j’ai toujours eu tendance à humaniser les objets et il y a bien sûr l’influence Harry Potter qui est passée par là. Pour toutes ces raisons, ça m’étonne toujours quand on qualifie mon univers d’original : il est surtout le fruit d’un fameux méli-mélo d’influences digérées au fil du temps par mon imagination !
L'écriture d'un roman de la sorte doit être un long chemin, combien de temps avez-vous mis pour finaliser le tome 1 de "La Passe-Miroir"?
Pour le tome 1 ? Il m’a fallu six mois pour en écrire le premier jet et une année complète pour entièrement le retravailler. Pour le tome 2, le travail de réécriture a été plus long (un an et demi), car c’était la première fois que j’écrivais en tant qu’auteure publiée : je me suis mise une telle pression que j’ai complètement grippé ma machine intérieure.
Qu'avez-vous cherché à faire ressentir aux lecteurs à travers l'anti-héroïne qu'est Ophélie ?
Quand j’ai créé Ophélie (et je dois avouer qu’à cette époque je l’avais créée davantage pour moi-même que pour d’éventuels lecteurs, vilaine égoïste que je suis), je voulais voir évoluer un personnage qui partait avec de nombreux handicaps pour affronter des situations très difficiles. Ce qui me stimulait, c’était vraiment de voir comment elle allait parvenir à révéler ses ressources intérieures tout en restant fidèle à elle-même. Et puis, je voulais d’un personnage qui s’accepte tel qu’il est. Ophélie est petite, myope, quelconque et maladroite, mais elle compose avec ça sans se noyer dans des complexes. Je reçois parfois des messages de lecteurs que ça perturbe un peu et qui aimeraient la voir se métamorphoser en princesse de contes de fée. Je voudrais leur faire comprendre qu’il existe des métamorphoses beaucoup plus intéressantes.
La qualité de votre plume est indéniable, vos mots sont toujours très bien choisis et vos phrases nous glissent sous les yeux. Votre roman est bien décrit et rempli de détails croustillants. Retravaillez-vous votre texte pour obtenir un tel résultat ?
C’est amusant, car je n’ai pas tant que cela l’impression de « bien écrire ». À mes débuts, j’avais très peu de vocabulaire et j’en faisais un tel complexe que je me suis mise à dévorer des dictionnaires. Je suis alors tombée dans l’extrême inverse où je farcissais chaque phrase de mots rares et où je cherchais des formules, des expressions les plus alambiquées possibles. Au final, on devinait plus l’histoire qu’on ne la comprenait ! Avec la Passe-miroir, j’essaie de trouver un juste milieu. Être à la fois claire et évocatrice dans une langue qui est un peu désuète. Je veux que le lecteur visualise chaque scène, chaque passage sans non plus avoir à fournir des efforts démesurés.
Mais oui, je retravaille mon texte. Je compare souvent cet exercice à la peinture. Je mets d’abord une première couche où j’écris comme ça vient, puis j’ajoute un petit détail ici, une touche d’émotion là, jusqu’à ce que j’obtienne la scène que j’avais en tête. Récemment, mon éditeur m’a appris à retravailler mon texte dans l’autre sens : être aussi capable de sacrifier les fioritures qui ne servent pas véritablement l’intrigue, à resserrer la narration autour d’un axe de tension.
Combien de tomes, au final, comptera la Saga ? La trame de votre histoire est-elle déjà établie ?
Je table sur quatre tomes composé de deux arcs : le premier arc, qui s’étend sur les deux premiers tomes, se déroule principalement au Pôle ; le deuxième arc nous emmènera ailleurs. J’ai une idée assez précise de l’intrigue du tome 3 (dont j’ai commencé la rédaction cet été, eh, eh) et si je connais déjà les grandes révélations du tome 4, je n’ai pas encore d’intrigue bien définie. Mais je sais ce vers quoi je me dirige, oui !
Nous attendons impatiemment la sortie du tome 2, pouvez-vous nous en dire quelques mots ? À quoi doit-on s'attendre ?
Ah, ah, patience, il sortira le 28 octobre ! Ce que je peux en dire, c’est qu’on va y retrouver tous les personnages du premier tome, mais de façon généralement plus approfondie. Il aura un petit côté « polar » plus prononcé aussi, avec beaucoup de mystères à élucider. Ah, et vous vous rappelez du drôle de petit prologue au tome 1 (« Au commencement, nous étions un. Mais Dieu nous jugeait impropres à le satisfaire ainsi, etc. ») ? Beaucoup de lecteurs m’ont dit qu’ils ne voyaient pas bien le rapport avec l’histoire principale. Le tome 2 établira ce rapport de façon formelle !
Quel lien entretenez-vous avec votre maison d'édition ?
Gallimard Jeunesse est établi à Paris et moi en Belgique. Nous n’avons donc pas souvent l’occasion de nous voir, mais nous communiquons beaucoup par e-mail et par téléphone. Il nous a fallu un peu de temps pour apprendre mutuellement notre mode de fonctionnement personnel, mais nous avons bien trouvé nos repères à présent. Par exemple, mon éditeur a compris que je suis une auteure qui a besoin de temps et de tranquillité pour écrire : il évite de me solliciter trop souvent. De mon côté, je m’efforce de le tenir informé de mes avancées (ou de mes blocages) afin qu’il ne reste pas dans le brouillard. De même, Gallimard Jeunesse tient compte de ma personnalité pour l’aspect promotion. Je suis quelqu’un de très peu à l’aise face aux médias et de très intimidée face à un public : on ne m’a jamais forcée à faire quelque chose que je ne me sentais pas de faire. Comme je ne suis pas le genre d’auteur à passer facilement à la radio ou sur youtube, j’essaie de compenser en étant plus présente sur Internet.
Maintenant, ce qu’il faut savoir, c’est qu’une maison d’édition, ce n’est pas une seule personne. Gallimard Jeunesse, c’est une équipe entière ! Entre le responsable éditorial, ma conseillère littéraire, le service comptable, les contacts presse, salons et librairies, j’ai beaucoup d’interlocuteurs différents.
Les retours et remarques que vous recevez de la part de vos lecteurs vous aident-elles à progresser ? Les prenez-vous en considération pour la suite de votre écriture ?
Oh que oui ! Que ce fût à l’époque ancestrale où je postais mes chapitres sur Internet ou que ce soient les observations que me font actuellement mes lecteurs, je tiens compte de ce qu’on me dit, en particulier si la même remarque revient plusieurs fois. Par exemple, on reproche souvent au Livre 1 d’être lent à mettre son intrigue en route, de trop prendre son temps au début. J’ai essayé de rectifier le tir en conséquence sur le Livre 2 : ça m’a demandé de beaucoup travailler et retravailler ce début-là, car ce n’était pas un exercice facile pour moi, mais ça m’a aidée à progresser ! De même, si un lecteur pose une question pertinente à laquelle je n’ai pas répondu dans le Livre 1, ou qu’il pointe une incohérence, ça m’est très utile dans la rédaction de la suite. Et ce sont souvent les lecteurs les plus jeunes qui me font les remarques les plus justes !
Il y a par contre une chose qui n’influe pas sur mon écriture. Ce sont les désirs des lecteurs. Ceux qui voudraient que je forme tel ou tel couple, que je mette au premier plan tel ou tel personnage, que je développe tel ou tel point de l’univers. Je prends beaucoup de plaisir à lire ces messages, mais je ne changerai pas pour autant ce que j’avais prévu d’écrire. En revanche, je n’empêche absolument pas mes lecteurs de développer leur propre vision de la Passe-miroir à travers des fanarts ou des fanfictions ! Je pense même que la frustration est le meilleur moteur de la créativité.
Vous êtes désormais une auteure publiée, concrètement, qu'est-ce que cela a changée dans votre vie ?
Avant d’être publiée, je sortais d’une longue convalescence consécutive à mon cancer, j’étais sans emploi, je sortais rarement de chez moi et je ne voyais pas grand monde en dehors de mon Cher Et Tendre. Ma famille habite loin et mon cercle d’amis le plus actif était (et demeure encore) la communauté d’auteurs de Plume d’Argent. Je passais la quasi-totalité de mon temps sur ordinateur.
Être publiée m’a rouvert une porte sur le monde extérieur, ainsi qu’une fenêtre sur moi-même. Je ne me perçois plus ni comme malade, ni comme sans emploi : je suis « auteur jeunesse ». Je passe toujours énormément de temps sur ordinateur, mais je voyage aussi à côté, je suis invitée à des salons du livre, dans des librairies, par des collèges ! Me re-confronter au regard des autres n’a pas été facile au début, j’avais toujours l’impression que les gens ne verraient que « ça », la marque que la maladie a imprimée sur mon corps. À présent, je peux dire que d’avoir été bousculée un peu est ce qui m’est arrivé de mieux ! Le changement a aussi consisté à endosser de nouvelles responsabilités : écrire la suite de la Passe-miroir dans des délais raisonnables, par exemple. Ouille, ouille, les contraintes de calendrier ne me réussissent pas du tout !
L’une des seules choses qui n’a pas changé dans ma vie, c’est la présence inébranlable de mon Cher Et Tendre à mes côtés. Il a été présent dans la maladie et il est présent dans ma nouvelle vie d’auteur : il me coache, il m’encourage, il me conseille, il m’aide aussi à décompresser, c’est le meilleur des agents :-)
Quels sont vos objectifs maintenant ?
Ah, ah, ils sont tout tracés. À présent que Livre 2 est en cours d’impression, je vais déjà me consacrer à écrire la suite de la Passe-miroir. Je n’arrive pas encore à penser à « l’après ». J’ai parfois de nouveaux personnages, de nouvelles idées qui flottent autour de moi comme des bulles, mais ce ne sont pas encore des histoires proprement dites. Une étape à la fois !
Si vous aviez un seul conseil à donner aux jeunes écrivains toujours sur leur premier roman ?
Faites des erreurs. Ne cherchez pas la perfection du premier coup, suivez votre plume sans penser aux attentes des autres, n’ayez pas peur d’être maladroit, d’être cliché, d’être incomplet : allez de l’avant ! N’écrivez pas pour être publié, écrivez déjà pour vous-même, comme si vous étiez (car en vérité vous l’êtes) votre tout premier lecteur. Laissez ensuite reposer votre manuscrit dans un coin, puis relisez-le à tête reposée et faites-vous relire par des personnes de confiance. Beaucoup d’auteurs s’arrêtent après quelques pages parce qu’il y a trop de décalage entre l’histoire qu’ils ont en tête et l’histoire telle qu’ils l’écrivent. L’écriture, c’est comme le dessin, il faut pratiquer encore et encore et encore pour qu’elle parvienne enfin à mettre en mots les galaxies qui nous habitent.
Avez-vous un dernier mot pour vos fidèles lecteurs ?
Que l’écharpe soit avec vous ! Et pour toi, Steven, merci de m’avoir réservé ce bel espace de parole.
J’espère que cette petite interview vous aura plu ! Je vous invite à vous rendre sur sa page pour découvrir son univers ! On se retrouve prochainement pour d’autres nouvelles interviews !
Et vous ?
Connaissiez-vous cette auteure ? Avez-vous lu sa saga « La Passe-Miroir"? Celle-ci vous a-t-elle plu ? N’hésitez pas à parler de tout ça dans les commentaires !
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